Ce soir, sans trop savoir pourquoi et en comptant les
secondes (sans trop savoir pourquoi non plus, mais je sais pas, ça m’apaise, et
couplé à Blue in Green de Miles Davis, ça m’achèverait presque (dans le bon
sens du terme)), ce soir, donc, je tapotais du doigt en rythme chaloupé sur mon
clavier inerte quand l’envie m’a pris, comme ça, sans crier gare, par surprise,
au détour d’un détour : une envie soudaine de jouer de l’harmonica.
Je suis donc allé chercher le mien. Car oui, c’est une envie
qui m’avait déjà pris y’a quelques années et j’avais décidé de m’y mettre. Et
comme souvent avec mes envies, elles sont fugaces, et en plein milieu j’en ai
un peu marre (oui mesdames, ça nous arrive à nous aussi) et j’ai vite vite
envie de passer à autre chose. Tout ça pour dire qu’en le prenant entre les
mains, je me suis souvenu qu’à part When the saints go marching in, je savais
rien jouer. Tout comme mes nombreuses heures de solfège et de piano n’ont
accouché 25 ans après que d’un vague souvenir de la première mesure de Au Clair
de la lune. C’est insuffisant, comme disait ma professeure de l’époque. Je suis
ainsi en ce moment même la frustration incarnée. J’aimerais pouvoir jouer le
blues du libraire avec un chien miteux à ses pieds (j’ai bien une paire de
chaussons qui peuvent faire illusion, mais l’odeur n’y est pas. Enfin pas
encore), hurler à la lune tout ce qui me pèse sur le cœur (ça ira vite),
arpéger une lente complainte qui les ferait toutes revenir (elles ne reviennent
jamais) et mettrait des larmes dans les yeux des guerriers les plus aguerris
(qui finalement ne sont que des hommes comme les autres qui ne rêvent que de se
blottir au creux d’une poitrine accueillante avec un harmonica dans la bouche. Œdipe
et Freud sont sur un bateau qui tangue).
De dépit, et par habitude, j’ai plutôt mis un album de
Leadbelly et suis allé chercher mon exemplaire de l’excellent Meteor Slim de
Duchazeau. Du blues de crossroads à l’état pur, avec des bouts de Robert
Johnson, des morceaux de désespoir gros comme un crouton dans la soupe diluée
et ce dessin….bon sang…pile poil ce qu’il fallait. Certaines cases sont des
pochettes de vinyles à elles toutes seules, et on savait y faire, à l’époque,
en matière de pochettes (demandez à Crumb si vous le croisez), c’est pas rien
comme compliment. L’histoire, on s’en fiche un peu, l’important c’est l’ambiance
qui s’en dégage, le chien miteux bel et bien présent, l’harmonica dans la tête
et la guitare asséchée par les événements.
Un bel objet qui plus est, qui existe en version collector
avec vinyle, et qui ne vous minera pas le moral. Le blues, c’est bien plus que
ça. C’est aussi Lomax, d’ailleurs, tant que j’y suis, du même Duchazeau. Foncez.
Mais prenez votre temps. La route est longue.
Ma note : do
Lomax et les Jumeaux de la conoco Station, ce dernier étant pour moi le plus réussi, il y a un côté Coen Brothers dedans que j'adore.
RépondreSupprimerT'as cité Crumb, alors c'est cool. Mister Nostalgia chez Cornélius c'est un must have comme on dit sur les blogs.
RépondreSupprimerZ'êtes beaux. Tous. (même Thy qui ne viendra pas en avril...).
RépondreSupprimerune des plus belle BD lu, duchazeau a une belle maitrise du noir et blanc !
RépondreSupprimerJ'ai adoré cette bd. Je regrette d'ailleurs ne pas avoir eu la version avec le disque. Je me souviens avoir l'achetée dans le cadre d'un dossier musique pour un webzine littéraire (je m'occupais de la partie bd pour ce dossier, j'avais choisi cette bd-ci et Rébétiko :)). Bref, celui-ci, parce que j'ai été au blues avec mon père, du coup, c'était naturel.
RépondreSupprimerD'ailleurs, mon père l'a beaucoup aimé aussi.