dimanche 8 avril 2012

Skippy

On a souvent une fausse image de ce qu’est vraiment Peanuts (enfin Snoopy ou Charlie Brown, pour les titres des recueils), principalement lié à son format de publication thématique sans queue ni tête (et puis lire 100 strips uniquement sur le baseball, fatalement, ça lasse) et à son merchandising galopant et envahissant. En ça, Shultz était en quelque sorte le contraire de Bill Watterson. Mais seulement en ça. Car pour ce qui est du strip en lui-même, c’est un véritable tour de force qui a duré 50 années, sans pause, et sans qu’il délègue quoi que ce soit à qui que ce soit. Dans le genre feignasse, on a trouvé mieux.

Mais grâce à Fantagraphics d’une part et Dargaud de l’autre, on peut enfin déguster tout ça en ordre chronologique deux par deux dans de très jolis coffrets (il y en aura 13 en tout). Ce qui frappe avant tout, c’est à quel point son univers est planté pratiquement dès le début. Certains personnages arrivent au fur et à mesure, d’autres sont délaissés et Snoopy se découvre une conscience et des pattes arrières pour mieux converser avec Woodstock et jouer les Red Baron, mais en soi c’est cohérent et d’une simplicité limpide. Encore faut il réussir à développer cet univers sans jamais lasser, ce qu’il réussit magistralement.

C’est aussi mélancolique qu’une ballade de Beethoven (je n’ai aucune idée de si Beethoven a écrit des choses mélancoliques, mais en revanche maintenant je connais par cœur sa date de naissance, et Lucy aussi), aussi faussement naïf que de croire au Great Pumpkin, aussi tendre qu’une lettre de Saint valentin jamais laissée dans la boîte aux lettres par la little red haired girl, avec des running gags toujours frais à base de ballons de football américain. Charlie Brown est le loser le plus connu de la planète, et c’est très bien comme ça, on se dit que allez, ça ira mieux plus tard va, tu vas encore morfler à l’adolescence et après ce sera mieux, mais en attendant, il faut qu’enfance se passe et retourner sur le monticule pour mieux perdre ses chaussettes.

Peanuts, ce n’est pas une suite de strips hilarants avec chutes à gogo, c’est un univers complet et complexe ou chacun est représenté par des traits très simples aux différences pourtant bien trempées. On en ressort débordant de tendresse avec l’envie irrépressible d’aller danser sur la glace, le nez en l’air.


Bon allez, reste à parler de Mafalda, de Bloom County et de The Far side (et de Herriman) et on aura fait le tour des comic strips qu'il faut lire.

2 commentaires:

  1. Pour Mafalda, comme beaucoup, ça me rappelle les (très mauvais) cours d'espagnol...il va vraiment falloir que tu sois convaincant !
    Par contre pour les Peanuts, fabuleux souvenir, d'un moment où j'étais très malade et où mon père m'avait offert le méga album géant pour que les journées soient moins longues...
    (j'ai bien raconté ma vie, pardon...l'effet "peanuts" sans doute?).

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  2. Si peu de commentaires pour un tel chef d'oeuvre m'attriste. Les gens n'y croient pas quand on leur dit que c'est magnifique, qu'une fois qu'ils y auront goûté, qu'ils s'y plongeront corps et âmes, oubliant femme et enfants, vaches, poissons rouges et granolas... J'en fais trop? A peine... Vraiment si vous n'avez jamais vraiment essayé, commencez au tome 1 de l'intégrale et ensuite, ruinez votre compte en banque.

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