Si je faisais mon Bukowski (un Bukowski sobre, petit, non
ravagé par l’acnée ou la vie, certes) et que les sorties Bd étaient le champ de
courses, alors je parierais sur le cheval Portugal pour remporter celle de la
plus belle accumulation de clichés. Il aurait une vraie grande et belle
longueur d’avance sur ses concurrents, à tel point qu’on en essorerait les
pages à la recherche de kétamine dans le sang du jockey ou de gênes de poneys
dans celui du cheval (je vois pas comment ça pourrait ne pas être un avantage).
L’artiste trentenaire en mal d’inspiration qui se cherche un
peu, qui vit fantomatiquement dans son couple sans trop se poser de questions
(heureusement qu’elles sont là pour se les poser à notre place), même que du
coup elle en a un peu marre, sa moitié éphémère, qu’il ne s’ouvre pas un peu
plus et ne parle pas de ses sentiments et aspirations (de quoi je me mêle, cela
dit). Comme souvent quand on se cherche, on part se trouver ailleurs, dans le
passé, dans ses racines, dans sa famille, afin de creuser un peu loin du trou
qui est en train de se former sous ses pieds. Or, on les choisit pas, ses
racines, c’est comme ça. Les miennes sont à moitié Canadiennes, ce qui me vaut
quelques quolibets pour je ne sais quelle raison erablophobe, et du coup je
peux m’identifier à ce sympathique personnage qui se cherche à la trentaine, même
s’il ne me viendrait pas à l’esprit de prendre un avion pour Toronto afin de
mieux comprendre ce qu’est le déracinement et l’espoir de moins de neige
ailleurs, mais bon, chacun son truc.
Le titre de la
Bd ne laisse que peu de place au suspense et oui, en effet,
le voilà qui part crapahuter du côté du Portugal malgré ses réticences (se
faire plaquer aide à avoir envie de tourner une page et de retourner voir ses
cousins au soleil, faut dire). Je m’introspecte suffisamment pour ne pas avoir
envie de lire les autres le faire, c’est pour ça que pour ces sujets-là, j’ai
tendance à éviter l’obstacle bourriquement.
Sauf que celui-ci mérite pleinement d’être passé les bras
écartés et les cheveux au vent tellement l’exercice est lumineux et finalement
très peu nombriliste. Le quotidien rapporté à des questions existentielles tout
en subtilités, c’est pas donné à tout le monde. Surtout sur plus de 250 pages
qu’on lit d’une traite, surtout avec ces couleurs et ces planches qui ne font
jamais office de remplissage facile comme souvent dans ce genre.
Portugal c’est déjà un succès éditorial de bouche à oreille
de ohlala il faut que tu le lises, ça vaut son pesant de 35€, d’ailleurs il a
eu le prix des lecteurs Fnac à Angoulême c’est dire si….heu oui bon. Le succès
aurait pu être encore plus flamboyant sans un calcul assez étrange de Dupuis
qui a consisté à ne pas le réimprimer suffisamment pour Décembre et Janvier
tout en laissant la Fnac
faire des grosses piles d’invendus dans leur coin (ils doivent pas se rendre
compte que parfois, les lecteurs achètent leurs livres ailleurs). Mais bon, c’est
une râlerie purement professionnelle, faites pas attention.
Toujours est-il que dépasser un tel handicap n’est pas un
mince exploit, et que j’aurais aimé réussir à caser dans cette chronique le
terme ‘débourrage’, sauf que j’ai jamais su de quoi il s’agissait. J’attendrai
la prochaine Bd introspective nombriliste.
Les dessins ont l'air somptueux...En ce qui concerne l'histoire, tiens, c'est marrant comme je m'en contrefous de ce type et comme ce synopsis ne m'interpelle absolument pas...J'ai donc décidé que je ne regarderai que e les images, sans lire le texte. Voilà.
RépondreSupprimer